Les hommages du cardinal Ambongo au Pape François
Stanislas Kambashi, SJ – Cité du Vatican
François a été un Pape proche de l’Afrique. En 12 ans de pontificat, il a visité 10 pays africains. L’un de ses voyages mémorables aura été celui en RD Congo. Il y a notamment dénoncé le colonialisme économique et esclavagisant, et appelé à «retirer les mains de la RD Congo» et de l’Afrique, qui n’est pas une mine à exploiter. A Kinshasa, la capitale congolaise, le Pape François fut notamment accueilli par l’archevêque, le cardinal Fridolin Ambongo.
Le prélat congolais est actuellement le président du SCEAM, le Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et Madagascar. Durant le pontificat de François, le cardinal Ambongo a aussi été l’un des proches collaborateurs du Pape. Il fait partie du C9, le Conseil des neuf cardinaux chargés de conseiller le Souverain pontife pour la réforme de la Curie romaine. Après l’annonce de la mort du Pape, il s’est exprimé en ces termes.
Le Pape François est retourné à la maison du Père ce lundi 21 avril, lundi de l’octave de Pâques. Quels sentiments vous envahissent en ce moment?
C'est un sentiment de tristesse qui m'a envahi dès que j'ai appris cette nouvelle ce matin, d'autant plus qu'hier, le dimanche de Pâques, le pape lui-même s'est présenté sur la place de Saint-Pierre et a béni le peuple, ce qui nous donnait l'espoir qu'il était en train de reprendre ses forces. Donc c'est d'abord un sentiment de tristesse. En même temps, nous sommes dans la perspective de Pâques, où le Christ mort, est ressuscité. C'est aussi dans cette espérance de la résurrection que je crois aussi que notre très cher pape François est vivant. Donc il repose déjà dans la paix du Seigneur.
Le Pape François est apparu le dimanche de Pâques, vous l’avez rappelé, et il a imparti la bénédiction Urbi et Orbi. Dans son message avant cette bénédiction, il a lancé des appels forts en faveur de la paix, notamment au Sahel, au Soudan du Sud, au Soudan, dans la corne de l’Afrique et dans votre pays la RD Congo. En tant président du SCEAM, comme résonne, selon vous, ce message?
Pour nous en Afrique, ce que le pape a dit hier sonne comme sa dernière volonté, son testament, avant de quitter ce monde. Pendant tout son pontificat, le pape François a été une grosse voix en faveur de la justice, en faveur de la paix de par le monde, en faveur de la promotion de petits, de faibles. Il l’a dit hier et aujourd'hui, il est parti ! Pour nous ça sonne comme un testament qu'il nous laisse et que nous devons continuer à poursuivre pour le relèvement de ce continent qui souffre tant, pour la dignité des hommes et des femmes qui sont aujourd'hui victimes de toutes sortes de violences, toutes sortes d'injustices, pour gagner un peu plus de dignité, comme le pape François l’a toujours souhaité.
Éminence, vous êtes l’un des proches collaborateurs du Pape François, en tant que membre du C9, le Conseil des neuf cardinaux chargés de conseiller le Saint-Père pour la réforme de la curie romaine. Que peut-on retenir de François, au regard des nouveautés qu’il a apportées?
Le pape François restera dans l'histoire comme le pape de la réforme. Il a beaucoup fait pour la réforme de l'Église, et cela doit continuer et, je crois que ça continuera, pour la simple raison qu'avant de partir il a conclu le cycle du synode sur la synodalité. Et ce qui a été produit par ce synode est devenu un patrimoine pour l'ensemble de l'Église. Même si le pape François n'est plus là, ce patrimoine il nous le laisse, et c'est à nous de mettre en application ce que lui a toujours souhaité. Moi je suis convaincu que la réforme va continuer.
Vous avez évoqué la synodalité. Mi-mars, le Pape François avait approuvé le début d'un chemin synodal qui doit conduire à une Assemblée ecclésiale en 2028. En ce moment, peut-on dire que le cheminement synodal initié reste inachevé?
Inachevé, je ne dirais pas. Le pape répétait toujours : «je prie le Seigneur pour qu'il m'accorde assez de temps pour que les réformes commencées puissent atteindre le point de non-retour». Je crois que les initiatives réformatrices entreprises par le pape François ont atteint aujourd'hui le point de non-retour. Voilà pourquoi je suis convaincu que les réformes vont continuer. Pour l'Église universelle, c'est plutôt ce rapprochement que le pape François a voulu faire entre l'Église et la société, c'est-à-dire que l'Église ne vive pas comme en dehors de la réalité qui l'entoure, mais tout en étant le sel de la Terre et la lumière du monde, elle puisse éclairer les réalités du monde autour de nous. Je crois que ça c'est un héritage formidable que le pape François nous laisse.
En tant que président du SCEAM, le Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et Madagascar, selon vous, quel héritage le Pape François laisse à l’Afrique?
Pour le continent africain c'est essentiellement la promotion de la valeur de la personne humaine, la dignité de la personne humaine. Comme vous le savez, s'il y a une partie du monde où l'être humain souffre, c'est certainement chez nous en Afrique. On se souviendra encore du dernier voyage apostolique effectué au Congo, à Kinshasa, avec les paroles fortes et prophétiques qu'il a prononcées et qui résonnent non seulement dans les oreilles des Congolais, mais dans les oreilles de l'ensemble du continent africain et du monde entier. Je crois que pour nous, l'héritage que le pape François nous laisse, c'est justement ce combat que nous devons continuer à mener au nom de l'Évangile, au nom de l'amour les uns pour les autres, pour que tous les Africains puissent vivre en dignité.
Le Pape François a visité votre pays, la RD Congo, en 2023. Ce voyage est resté mémorable, avec des appels forts, notamment contre l’exploitation et la colonisation économique. Comment ces appels continuent à parler à votre pays aujourd’hui encore?
Lui-même, le pape François, considère le voyage effectué au Congo comme une de ses plus importantes visites apostoliques. Lui-même a été marqué par l'accueil, l'enthousiasme du peuple, sa présence qui suscitait tellement l'espérance du peuple. Ce que nous retenons de cette visite, c’est qu’elle a été vécue comme une sorte de parenthèse. Vous savez, actuellement le peuple congolais souffre. Dans ce contexte, la visite du pape a été comme une sorte de parenthèse où le peuple a vécu, a expérimenté un moment de bonheur, un moment de béatitude, un moment de communion entre Congolais, un moment de communion entre le peuple et son Dieu. Cela restera pour l'histoire.
En ce moment de deuil pour la disparition du Pape François, quel appel lancez-vous aux fidèles chrétiens?
Nous sommes tous affectés par cette triste nouvelle, mais dans l'espérance, nous sommes croyons que le pape François est déjà dans la maison du Père. Je demande tout simplement au peuple de Dieu de continuer à le porter dans ses prières et garder une attitude de recueillement de prière pendant cette période de deuil. Je demande donc à mon peuple de continuer à le porter dans ses prières et garder une attitude de recueillement de prière pendant cette période de deuil.
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