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Le Pape François recevant le Secrétaire général de l'Onu Antonio Gutteres en 2019. Le Pape François recevant le Secrétaire général de l'Onu Antonio Gutteres en 2019.  

«La diplomatie du Pape François a renvoyé à un désir d’humanité et de paix»

Alors que de nombreuses délégations étrangères sont attendues ce samedi au Vatican pour les funérailles de François, parmi lesquels 50 chefs d’État, retour sur la manière dont le pape argentin a envisagé son action diplomatique, entre ruptures et tradition.

Olivier Bonnel – Cité du Vatican

Le 26 avril, plus de 130 délégations officielles du monde entier sont attendues sur le parvis de la place Saint-Pierre pour les funérailles du Souverain pontife, donnant à l’évènement un aspect de «concert des nations». 50 chefs d’États, parmi lesquels Donald Trump, Volodymyr Zelensky ou Emmanuel Macron, les présidents argentin Javier Milei et brésilien Lula mais encore le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, ou la présidente de la Commission Européenne, Ursula Von der Leyen. Dix souverains sont également annoncés dont le roi d’Espagne Felipe VI. Le prince William représentera lui la couronne britannique.

Le Pape François n’était pas diplomate de formation, contrairement à ses prédécesseurs du XXème siècle comme Pie XII, Jean XXIII ou Paul VI. Mais dans un monde fracturé par les conflits et défis géopolitiques, et compte-tenu fort du poids moral de l’Église catholique à travers le monde, l’action diplomatique du Pape François laisse immanquablement une trace.

«La diplomatie sous François s’est inscrite dans la continuité de ses prédécesseurs du XXe siècle, en s’adressant à la communauté internationale, sans exception» analyse François Mabille, chercheur au CNRS et spécialiste de la diplomatie pontificale, auteur de livre Le Vatican. La papauté face à un monde en crise (Eyrolles, 2025). «Quand on parle de société internationale ou de communauté internationale, cela veut dire pour le Vatican que l'on s'adresse à une seule humanité, un seul genre humain, en pensant que finalement il y a une destinée commun», ajoute-t-il.

Un Pape «Nord-Sud»

Durant les douze années de pontificat de François, la vision géopolitique du plus petit État du monde est entrée en confrontation directe, avec le retour des hégémonies et des tentations impériales. Pour François Mabille, cela est vrai des États-Unis de la Chine et bien-sûr de la Russie. Pour autant, le Pape argentin s’est inscrit dans la continuité en réaffirmant l’un des principes cardinaux du Saint-Siège: on peut discuter avec tout le monde. Un positionnement qui est parfois mal compris dans certaines chancelleries ou enceintes internationales. 

«Il y a une autre confrontation, qui touche à l'imaginaire collectif, poursuit François Mabille, qui est que le Pape François a renvoyé à une figure d'unité et une figure de paix». Une sature universellement reconnue par les opinions publiques et dans une moindre mesure par la majorité des pays dans le monde.


Mais la «révolution François» en matière diplomatique tient avant tout à ses origines de premier pape latino-américain. «De la même façon que Jean-Paul II, polonais, avait bien évidemment, par son histoire, un intérêt particulier pour l'Europe et une grille de lecture Est-Ouest, François a infléchi l'approche du Saint-Siège dans une grille de lecture facilement identifiable, qui est une grille de lecture Nord-Sud» explique François Mabille. Une influence culturelle qui a poussé le pape argentin à adopter un regard parfois très critique sur l'Occident, dénoncé souvent dans les enceintes onusiennes, où devant certains dirigeants de pays pauvres où François a dénoncé une «colonisation idéologique ».

L’urgence d'un monde en crises

L’action diplomatique du Saint-Siège sous le pontificat de François aura aussi du affronter des nouveaux défis, à commencer par la crise écologique dont les répercussions sociales et géopolitiques sont majeures, et qui sont au cœur de son encyclique Laudato Si de 2015.

Dénonçant à maintes reprises une «troisième guerre mondiale par morceaux», face à la multiplication des conflits et à la fragmentation des sociétés, François n’aura eu de cesse de rappeler à la force du multilatéralisme et au courage d’agir. « Nous ne pouvons pas nous permettre de reporter pour plus tard ‘‘certains agendas’’. L’avenir exige de nous des décisions critiques et globales face aux conflits mondiaux qui augmentent le nombre des exclus et de ceux qui sont dans le besoin » lancera t-il à la tribune des Nations-Unies en septembre 2015.

Ce qu’est une «diplomatie de l’espérance»

Durant son pontificat, un marqueur important de François aura été de développer une «diplomatie de l’espérance», fondée sur la miséricorde. Dans la tradition diplomatique du Saint-Siège, elle réaffirme les principes de la dignité humaine et l’affirmation de la justice comme principe fondamental.

«Pour le pape François et le Saint-Siège, il s’est agit de ne pas essentialiser la figure de l'ennemi» explique François Mabille. L’une des caractéristiques de la diplomatie pontificale sous François a été de rappeler que les catholiques sont porteurs d'une espérance et il ne faut pas désespérer finalement de l'humain, quel qu'il soit».

Une diplomatie de l'espérance qui reste ouverte pour le monde d’aujourd’hui, surtout alors que les conflits en Ukraine ou au Proche-Orient sont loin d’être résolus. 

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25 avril 2025, 11:45