Méditation de la Veillée Pascale: «Pourquoi chercher le Vivant parmi les morts ?»
Frères et sœurs bien-aimés,
Ce soir, une question résonne comme un éclair dans notre nuit: «Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ?» (Lc 24, 5). Une question qui nous bouscule, nous aussi, disciples du XXIe siècle. Les femmes cherchent Jésus dans un tombeau, mais Dieu les renvoie vers la vie. Et nous ? Où cherchons-nous l’espérance aujourd’hui ?
Les femmes venues embaumer un cadavre découvrent l'impensable: la pierre roulée, les linges abandonnés, ce corps absent qui devient présence vivante. Comme elles, combien de fois cherchons-nous Dieu là où Il n'est plus ? Dans nos habitudes religieuses sans vie, dans nos certitudes qui rassurent, dans nos tombeaux intérieurs de peur ou de découragement.... Pourtant, l'ange nous redit : «Rappelez-vous sa parole» (Lc 24, 6). La mémoire de la Promesse devient lumière – la mort n'a pas le dernier mot. En cette nuit pascale, nous sommes invités à nous rappeler: le Christ a vaincu la mort ! Nos échecs, nos deuils, nos péchés ne sont pas des impasses. La Résurrection est l’espérance inébranlable: avec Dieu, le dernier mot n’est jamais la tombe.
Cette nuit, le cierge pascal illumine nos obscurités. Comme les femmes au tombeau, nous sommes envoyés pour devenir témoins de la Résurrection. Le monde a soif de cette espérance : non pas un Dieu lointain, mais un Sauveur vivant qui nous précède en Galilée (cf. Mt 28, 7), c’est-à-dire dans nos quotidiens. Frères et sœurs, ne repartons pas comme avant. Laissons la lumière du Christ transfigurer nos vies. Il est ressuscité, et nous ressuscitons avec lui !
Regardons autour de nous: un monde de tombeaux! Des guerres qui broient des vies, des familles déchirées, des rivalités qui empoisonnent nos communautés. Nous en parlons, oui. Nous vivons dans un monde où la haine semble souvent plus forte que l’amour, où la mort – physique ou spirituelle – frappe tant d’hommes et de femmes.
Nous dénonçons facilement ces maux… mais où sommes-nous, vraiment, dans ces combats ? Le Ressuscité nous demande : Avons-nous déjà essuyé les balles avant de juger ceux qui prônent la fin des conflits ? Nous parlons de «violence juste»… mais avons-nous déjà subi cette violence ? Avons-nous tendu la main à un ennemi avant de prôner la réconciliation ? Avons-nous partagé nos biens avant de dénoncer les injustices ?
Pourtant, au milieu de ces ténèbres, des témoins montrent que le Christ agit: ces mères qui pardonnent au meurtrier de leur enfant, ces jeunes qui bâtissent la paix, ces communautés qui accueillent les exclus... Ces gestes de résurrection ne naissent pas dans des lieux extraordinaires, mais justement là où la vie semble la plus ordinaire - dans nos Galilées quotidiennes. Car le Ressuscité nous précède en Galilée, précisément là où nous vivons : dans nos maisons, nos quartiers, nos lieux de travail. C'est au cœur de ces réalités banales qu'Il nous attend pour les transfigurer. Il sanctifie aujourd'hui nos vies apparemment sans histoire, quel que soit le lieu, - là où l'amour s'incarne en actes simples mais prophétiques, dans des zones de guerres, dans les familles divisées, dans les communautés humaines fragmentées.
Pierre, d'abord incrédule, court au tombeau (Lc 24, 12). Son étonnement devient commencement de foi. À notre tour: quittons nos tombeaux de peurs, d'indifférence et de compromis. Croyons vraiment que le Christ est vivant – pas seulement dans les chants, mais dans nos choix. Agissons pour que, nous voyant, le monde croie: un pardon offert vaut tous les discours sur la réconciliation ; un repas partagé avec un pauvre est plus fort que les théories sur la justice. Chaque fois qu’un geste brise la logique de violence pour tisser de la fraternité, le tombeau s’entrouvre à nouveau.
L’adresse actuelle de Dieu, ce n’est pas un tombeau, ce n’est pas une région spécifique du monde. L’adresse actuelle de Dieu, c’est là où des inconnus deviennent frères, là où la peur cède place à l’hospitalité. Voilà pourquoi le pape François nous appelle à être une «Église en sortie» – non pas une forteresse fermée, mais un peuple qui «prend l’initiative, qui se laisse bouleverser par la souffrance du monde» (Evangelii Gaudium, 24). Le Christ ressuscité ne nous demande pas de répéter des mots, mais de «faire la vérité» (Jn 3, 21) par des gestes qui déchirent les ténèbres: visiter un prisonnier, tendre la main à un migrant, risquer la paix quand la haine semble plus forte.
Ce soir, le cierge pascal n’est pas un symbole – c’est un feu qui embrase nos vies. Comme le dit le Pape François : «La foi est une flamme qui grandit quand on la partage» (EG 9). Ne repartons pas comme avant. Le Christ est ressuscité – alors, debout ! Debout pour aimer quand la haine semble gagner, debout pour espérer quand tout semble perdu, debout pour annoncer, par nos vies transfigurées: «Il est vivant – et nous vivons par Lui !»
Amen! Alléluia!